lundi 31 août 2015

Baisser les impôts, avant les déficits ?

Il y a quinze jours, je postais un billet de blog proposant de faire descendre les impôts par l'ascenseur, et les dépenses par l'escalier, après un article dans les Échos sur le même thème. Qu'est ce qu'on n'a pas entendu !!! "100 milliards, c'est trop!" a chanté le chœur des tenants de l'orthodoxie budgétaire. Et pourtant il y aurait tant à dire sur certains de ces procureurs, aujourd'hui reconvertis en grands défenseurs de la rigueur budgétaire, et hier dépensiers à crédit des deniers de l'Etat qui leur étaient confiés. Je persiste et je signe. Nous avons besoin d'une baisse massive des impôts sur les facteurs de production. Pour retrouver de la compétitivité. Pour redonner de l'air à nos entreprises. Pour remettre l'économie en marche, tout simplement. Et surtout, surtout, créer les emplois qui manquent cruellement. Nous devons proposer aux Français, et négocier avec nos partenaires européens, un "paquet": des baisses d'impôt sur le capital productif et le travail tout de suite, et des réformes structurelles, en particulier sur les retraites, dans le même mouvement. Ce faisant, nous devrons assumer deux options fortes: d'abord, le choix de baisser les impôts sur les facteurs productifs, plutôt que sur les particuliers. Bien sur, il faudra alléger le fardeau des particuliers dès que possible. Mais commencer par là, comme le proposait la gauche version frondeurs ce dimanche dans un article du JDD, c'est surtout, en l'état actuel de notre compétitivité, nourrir les importations chinoises, allemandes, et d'autres fournisseurs. Il nous faut d'abord redresser notre compétitivité. Ensuite, celui d'augmenter momentanément notre déficit. Car les réformes structurelles que nous devons faire, comme l'indispensable réforme des retraites, sont des mèches lentes. Elles feront effet plus lentement. Et dans l'intervalle, le déficit se creusera. Évidemment, c'est là le cœur de la critique. Le déficit est devenu l'alpha et l'oméga du discours politico-médiatique sur les finances publiques. Il focalise plus l'attention que le nombre de chômeurs. Ça s'est fait en quelques années. D'abord objet de déploration, il est désormais étalon de la réussite - et plus souvent de l'échec - d'une politique. On s'envoyait à la tête le chiffre des déficits passés, on fait maintenant la course à la vertu sur le chiffre des déficits futurs. Avec une crédibilité toute relative, compte tenu du passif de la classe politique dans son ensemble sur le sujet. Et une spécificité française: le gouvernement parle de déficit, ses opposants sur sa gauche déplorent "la rigueur", mais depuis 2012, nous sommes toujours au dessus de 4% par an. Pourtant voilà un sujet de péroraison bien abscons pour une large majorité de nos concitoyens. Abscons et pas forcément très pertinent pour évaluer la santé d'une économie, et la qualité des efforts fournis pour la redresser. Car le déficit est une résultante. La conséquence d'un grand nombre de facteurs, qui pour certains échappent totalement à la maîtrise des dirigeants. Le terme même de déficit ne veut pas dire grand chose. La France a aujourd'hui un déficit de consommateur qui vit au dessus de ses moyens et doit emprunter pour boucler ses fins de mois. Et si pour se relancer elle avait besoin transitoirement d'un déficit d'investisseur qui a besoin de financer ses réformes structurelles et d'être accompagné le temps qu'elles portent leurs fruits? C'est peut être un effet de génération, et le sentiment de l'injustice qu'il y a à trainer tous ces déficits qui ne sont pas ceux de ma classe d'âge, mais je le redis, cette question des déficits ne peut pas être l'alpha et l'oméga du discours et des programmes politiques, sinon la France continuera à se vider de sa jeunesse, de ses investisseurs et de ses entrepreneurs. Nous ne crevons pas de trop de déficits, nous crevons de trop d'impôts. Il est de toutes façons illusoire d'espérer résorber les déficits seulement en baissant les dépenses. On ne sait pas réduire le déficit sans croissance. Il n'existe pas d'exemple de réussite d'un tel projet. Ceux qui proposent aujourd'hui de réduire d'abord les dépenses, puis le déficit, puis la dette, puis finalement, un jour, les impôts devraient se souvenir qu'aucun gouvernement n'a jamais su parcourir ce chemin. Et à supposer qu'il existe, il est peu probable qu'on puisse aller à son terme en un seul quinquennat, et arriver jusqu'à la baisse des impôts dans un délai raisonnable. On nous propose donc de mourir guéri. Révoltons nous!